Leçon 218 - Systèmes différentiels linéaires du premier ordre à coefficients constants.
Exemples.

Analyse - Équation différentielle
| Samedi 25 Janvier 2025

Dans tout ce qui suit, \( I \) désigne un intervalle de \( \mathbb{R} \) et \( n\in\mathbb{N}^* \).

Considérons une équation différentielle linéaire scalaire d'ordre \( n \), notée

\( y^{(n)}(t) +\,a_{n-1}\,y^{(n-1)}(t) +\,{\small \dots} \) \( +\,a_0\,y(t) = b(t) \)

\( (a_i)\in\mathbb{R}^n \) et \( b\in\mathscr{C}(I, \mathbb{R}) \).

Posons \( Y = \begin{pmatrix}y\\\dots\\y^{(n-1)}\end{pmatrix} \). Alors \( Y' = \begin{pmatrix}y^{(1)}\\\dots\\y^{(n)}\end{pmatrix} \). Ainsi, nous obtenons :

\( \small\overbrace{\begin{pmatrix}y^{(1)}(t)\\y^{(2)}(t)\\\dots\\y^{(n-2)}(t)\\y^{(n-1)}(t)\\y^{(n)}(t)\end{pmatrix}}^{Y'(t)} = \) \( \small\overbrace{\begin{pmatrix} 0 & 1 & 0 & 0 & \dots & 0\\ 0 & 0 & 1 & 0 & \dots & 0\\ \dots & \dots & \dots & \dots & \dots & \dots \\ 0 & 0 & 0 & \dots & 1 & 0\\ 0 & 0 & 0 & \dots & 0 & 1\\ -a_0 & -a_1 & -a_2 & \dots & -a_{n-2} & -a_{n-1} \end{pmatrix}}^A \) \( \small\times\overbrace{\begin{pmatrix}y(t)\\y^{(1)}(t)\\\dots\\y^{(n-3)}(t)\\y^{(n-2)}(t)\\y^{(n-1)}(t)\end{pmatrix}}^{Y(t)}+\overbrace{\begin{pmatrix}0\\0\\\dots\\0\\0\\b(t)\end{pmatrix}}^{B(t)} \)

 

Moralité : une équation différentielle linéaire scalaire d'ordre \( n \) peut se traduire par un système différentiel linéaire du premier ordre à coefficients constants.

Notons au passage que \( A \) est une matrice très connue, appelée matrice compagnon du polynôme \( P = \displaystyle\sum_{i= 0}^n a_i X^î \).

1. Notions élémentaires

Dans tout ce qui suit, \( \mathbb{K} \) désigne indifféremment \( \mathbb{R} \) ou \( \mathbb{C} \),

Considérons \( E \), un \( \mathbb{K} \) espace vectoriel de dimension finie \( n\in\mathbb{N}^* \), un endomorphiqme \( a\in\mathscr{L}(E) \) et une fonction continue \( b\in\mathscr{C}(I, E) \).

Enfin, \( y\in\mathscr{C}^1(I, E) \)

Définition : on appelle système différentiel linéaire homogène du premier ordre à coefficients constants l'équation :

\( ({\cal E}_0) : y' = a.y \)

On note \( \mathscr{S}_0 \) l'ensemble des solutions \( y \) du système \( ({\cal E}_0) \).

Définition : on appelle système différentiel linéaire du premier ordre à coefficients constants l'équation :

\( ({\cal E}) : y' = a.y + b \)

On note \( \mathscr{S} \) l'ensemble des solutions \( y \) du système \( ({\cal E}) \).

Propriétés :
- \( \mathscr{S}_0 \) est un sous-espace vectoriel de \( \mathscr{C}^1(I, E) \).
- \( \mathscr{S} \) est un sous-espace affine de \( \mathscr{C}^1(I, E) \), de direction \( \mathscr{S}_H \).

2. Le problème de Cauchy

Définition : résoudre le problème de Cauchy en \( (t_0, y_0)\in I\times E \) consiste en la recherche de toutes les solutions \( y \) de \( ({\cal E}) \) vérifiant \( y(t_0) = y_0 \).

Théorème [de Cauchy-Lipschitz linéaire]
Pour tout \( (t_0, y_0)\in I\times E \), il existe une unique solution de \( ({\cal E}) \) au problème de Cauchy.

Preuve : admis.

Corollaire : \( \mathscr{S} \) est isomorphe à \( E \), et donc \( \dim\mathscr{S} = n \).

Définition : on appelle système fondamental toute base de \( \mathscr{S}_H \).

3. Résolution par passage à l'exponentielle

Propriété
- Les solutions de l'équation \( ({\cal E_0}) \) sont de la forme \( y(t) = e^{ta}\times k \), où \( k\in E \).
- Les solutions de l'équation \( ({\cal E}) \) sont de la forme :

\( y(t) = e^{ta}\times k + e^{ta}\times c(t) \)

\( k\in E \) et \( c\in\mathscr{C}^1(I, E) \) telle que \( c'(t) = e^{-ta} \times b(t) \).

Preuve : il suffit de dériver \( y \) pour s'en convaincre !

Cette écriture s'appelle souvent la "variation de la constante" - ou méthode de Lagrange.

Pour conclure, nous pouvons être plus précis encore lorsqu'on dispose de conditions initiales :

Théorème [expression intégrale de la solution]
Pour tout \( (t_0, y_0)\in I\times E \), la solution au problème de Cauchy pour \( ({\cal E}) \) est

\( y(t) = e^{\small(t - t_0)\times a}\times y_0 \) \( + \displaystyle e^{ta}\times\int_{t_0}^t e^{-sa}\times b(s)ds \)

Le problème, évidemment, est subtil : ce sont des matrices. Le calcul des exponentielles peut s'avérer difficile. Ainsi, nous allons avoir recours à quelques astuces algébriques.

Cette méthode peut tout de même fonctionner si la matrice est nilpotente.

Exemple no1
Résoudre sur \( \mathbb{R} \) le système différentiel \( X' = AX \), où \( A =\begin{pmatrix}1 & 2& 1\\-1 & -2 & -1 \\1 & 2& 1\end{pmatrix} \).

4. Résolution par réduction de l'endomorphisme

Ainsi, notons \( A \), la matrice de \( a \) dans la base canonique de \( E \) - de même pour \( Y \) et \( y \), pour \( B \) et \( b \).

Supposons que \( A \) soit trigonalisable.
Alors il existe \( P \) une matrice inversible et \( T \) une matrice triangulaire supérieure telles que \( A = PTP^{-1} \).
Le système initial \( Y' = AY+B \) devient alors \( Y' = PTP^{-1} Y + B \), d'où :

\( P^{-1} Y' = DP^{-1} Y + P^{-1}B \)

En posant \( X = P^{-1} Y \), donc \( P\times X = Y \), et \( F = P^{-1}B \), nous obtenons le système :

\( X' = T X + F \)

a) 1er cas : la matrice est diagonale
Si la matrice \( T \) est en réalité diagonale, on trouve les solutions \( X \) immédiatement car il s'agit de \( n \) équations différentielles du premier ordre à coefficients constants.
Enfin, on trouve les solutions \( Y \) en calculant \( Y = PX \).

Exemple no2
Résoudre sur \( \mathbb{R} \) l'équation différentielle
\( y^{(3)}(t) + y''(t) + y'(t) + y(t) = 0 \).

 

b) 2nd cas : la matrice n'est pas diagonale
On résoud les équations différentielles une à une en remontant le système.
Enfin, on trouve les solutions \( Y \) en calculant \( Y = PX \).

Exemple no3
Déterminer l'ensemble des solutions du système différentiel :
\( \begin{cases} x' = 3x - \phantom{1}y + 2t e^{4t}\\ y' = \phantom{1}x + 5y - 2t e^{4t} \\ \end{cases} \)

 

À noter : dans tous les cas, le calcul de \( P^{-1} \) n'est nécessaire que si l'équation n'est pas homogène